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Médicaments, la planète tousse ?

Selon une étude d’une ampleur inédite, publiée en février 2022 dans la prestigieuse revue américaine Proceedings of the National Academy of Sciences, seuls 2 cours d’eau sur les 258 étudiés sont épargnés par la pollution médicamenteuse : la Skogafoss, l’une des cascades les plus célèbres d’Islande, et l’Orinoco, qui traverse un village de l’ethnie Yanomami au Venezuela. Partout ailleurs sur la planète, le constat est net : les rivières étudiées sont contaminées et un quart présente des niveaux de pollution médicamenteuse qui peuvent être dangereux pour la biodiversité et la santé. Alors peut-on se soigner sans rendre notre planète malade ?

Des milliers de substances pharmaceutiques sont présentes dans la nature. Le secteur pharmaceutique utilise plus de 3 000 principes actifs pour soigner les hommes et les animaux à travers le monde. Sur ordonnance ou en vente libre, les médicaments sont produits à grande échelle : plus de 100 000 tonnes par an !

L’usage des médicaments est devenu massif. Si l’amélioration de l’accès aux médicaments dans de nombreux pays est un progrès formidable, la production des médicaments est aussi le symptôme d’une population mondiale qui vieillit, de cancers, et de maladies auto-immunes et cardiovasculaires qui se multiplient sous l’effet des pollutions et de modes de vie qui dégradent notre santé. Anti-douleurs, anti-dépresseurs, antibiotiques… Les médicaments sont la parade à tous nos maux. Près d’1 Français sur 2 consomme tous les jours au moins un médicament. Nos amis les bêtes, petites et grandes, domestiques ou d’élevage, ne sont pas en reste : si l’usage des antibiotiques à presque été divisé par 2 depuis 1999, ce sont encore 415 tonnes d’antibiotiques à destination des animaux qui ont été vendus en France en 2020 selon l’Anses.

Micropolluants et “maxi” pollution. S’ils nous soignent, les médicaments ne disparaissent pas purement et simplement après avoir fait leur œuvre, leurs résidus, invisibles à l’œil nu, se retrouvent dans les rivières, les sols, les réserves d’eau, les écosystèmes et dans la chaîne alimentaire, comme le montrent de nombreuses études scientifiques. La pollution peut se faire à différents niveaux. A l’étape de fabrication des médicaments, avec le rejet des usines de production pharmaceutique, même si cela est extrêmement limité du fait de la réglementation en France et en Europe. Veolia accompagne d’ailleurs ses clients du secteur de la santé dans la mise en place de systèmes performants de purification de l'eau. Puis après absorption du médicament par l’homme ou l’animal : entre 30 et 90% des principes actifs des médicaments sont directement excrétés par l’urine ou les selles et se retrouvent dans les égouts ou l’environnement. Ces déjections doivent alors être bien collectées, acheminées, traitées dans des stations d’épuration bénéficiant des traitements adéquats. ll faut enfin ajouter les déchets d’activité de soins (médicaments non utilisés et jetés), qui doivent être éliminés dans des filières spécialisées.

Vous reprendrez bien un peu de ce cocktail? Ces résidus représentent un cocktail explosif pour la planète . En 2019, l’OCDE alertait déjà dans son rapport Pharmaceuticals in freshwater sur les risques environnementaux. D’après l’Agence allemande pour l’environnement, 10% des produits pharmaceutiques présentent un risque environnemental. Les hormones, les antibiotiques, les analgésiques, les antidépresseurs, les anticancéreux, ainsi que les antiparasitaires à usage vétérinaire font partie des substances les plus préoccupantes. Les impacts sur les écosystèmes sont désormais certains : de nombreuses études constatent la féminisation des poissons et des amphibiens sous l’effet des contraceptifs présents dans l’eau. A date, les risques pour la santé humaine sont mal identifiés. Il est toutefois avéré que la propagation des antimicrobiens peut pousser les bactéries à développer de nouveaux mécanismes de défense, ce qui peut réduire l’efficacité de certains médicaments et les chances d’arriver à se soigner.

Des solutions collectives qui vont dans le bon sens. Pour répondre aux enjeux sanitaires et environnementaux, la France a encadré réglementairement la filière des Médicaments Non Utilisés (MNU) par la mise en place en 1993 de la filière à responsabilité élargie des producteurs (REP) pour les MNU.

En France, le circuit Cyclamed permet aux consommateurs de ramener les médicaments que nous n’avons pas utilisés (MNU) dans les pharmacies. Ils sont ensuite acheminés et massifiés chez les grossistes répartiteurs, intermédiaires chargés de faire le lien entre les laboratoires et les officines. Veolia, en partenariat avec Cyclamed, met à la disposition des grossistes des matériels fermés et sécurisés. Les MNU sont orientés vers les unités de valorisation énergétique dans des conditions de contrôle environnemental drastiques. Ce process de valorisation permet de fournir de l’électricité et/ou de la chaleur pour éclairer et chauffer des milliers de logements et d’établissements publics. Chaque année, plus de 14 000 tonnes de MNU sont collectés dans le réseau des 22 500 pharmacies puis transformés en énergie. Les MNU représentent environ 3 000 tonnes/an sur plus de 340 Millions de tonnes de déchets en France chaque année, soit 0,001 % du gisement des déchets.

En Suède, l’indice PBT (persistance, bioaccumulation et toxicité) mesure la dangerosité environnementale des médicaments et prend en compte les effets environnementaux au moment de la prescription. Cela permet aux professionnels de santé de privilégier dans une même catégorie de médicament la molécule la moins dangereuse pour l’environnement. L’OCDE préconise une approche globale, qui porte sur toutes les étapes du processus d’élaboration, de production, de mise en marché et d’usage des produits pharmaceutiques. Pour informer les consommateurs, elle suggère de créer des labels visibles sur les boîtes de médicaments sans ordonnance avec une note ou un indicateur de toxicité du produit sur l’environnement. Les médicaments les plus toxiques pour l’environnement pourraient aussi être accessibles uniquement sur ordonnance, ce qui permettrait de réduire leur usage.

Vers une consommation mesurée de médicaments ? Au quotidien, l’enjeu est de trouver le bon équilibre entre prendre soin de soi, de sa santé et de notre planète. Un défi pour notre planète autant que pour notre santé, puisqu’un environnement en bonne santé est un atout pour la santé humaine et animale ! Voici un rappel des bonnes pratiques à adopter :

  • Ne pas jeter les médicaments dans la nature ou dans les eaux usées (éviers, toilettes) mais je les rapporte à la pharmacie ;
  • Utiliser uniquement les doses nécessaires sans en rajouter
  • Ne pas uriner sur la voie publique ou dans la nature
  • Demander conseil à mon médecin pour la prescription de médicament la moins nocive pour l'environnement, à efficacité thérapeutique équivalent
  • Sensibiliser mon entourage et encourager les professionnels de santé que je côtoie à l'importance de cette démarche.



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Qu’est-ce que Cyclamed ?

1 seule réponse possible
Une entreprise de réparation de vélo
Le nom d’un cyclope
Le circuit de récupération des médicaments non utilisés pour les particuliers

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